Le réseau électrique français est piloté par RTE, le gestionnaire, qui doit en permanence faire coïncider l’offre à la demande. Mais parfois, cet équilibre peut être menacé, surtout en hiver, lorsque les températures chutent et que les besoins en électricité sont accrus.
Pour peu que le réseau soit affecté par des dysfonctionnements, comme un arrêt fortuit de réacteur nucléaire ou la coupure d’une ligne haute-tension, la situation devient alors très tendue. Dans cette situation, le compteur Linky peut-il être un levier pour sauver la France d’un blackout généralisé, comme l’évoquent certains utilisateurs de réseaux sociaux ?
L’idée consisterait à limiter à 1 ou 2 kVA la puissance des compteurs Linky afin d’éviter une coupure totale et générale. Ce bridage à distance permettrait de maintenir l’alimentation électrique des appareils essentiels dans tous les foyers : éclairage, réfrigérateur, dispositifs médicaux, téléphones et ordinateurs, mais empêcherait l’utilisation des plus gourmands radiateurs, lave-linges, sèche-linges, lave-vaisselle, fours et plaques de cuisson.
Si le concept est particulièrement intéressant, il soulève de nombreuses questions éthiques et légales, à tel point qu’il semble impossible à réaliser.
90 % des consommateurs sont équipés d’un compteur Linky
Au 31 décembre 2021, 90% des clients d’Enedis étaient équipées d’un compteur Linky selon la Commission de régulation de l’énergie (CRE). Un déploiement réalisé malgré de vives oppositions de la part d’une poignée de consommateurs. Pour ces « anti-Linky », le compteur communiquant est perçu comme intrusif et permettrait une forme de contrôle de la vie privée.
Le boîtier collecte en effet des données de consommation électrique extrêmement précises (avec consentement de l’utilisateur) et peut être piloté à distance, par exemple pour couper l’alimentation ou effectuer un changement de puissance souscrite.
L’idée de coupures ou limitations de puissance à distance via le compteur Linky a donc de quoi réveiller le mouvement « anti-Linky », qui commençait à s’essouffler. Mais démêlons le vrai du faux. Il est vrai que le compteur Linky peut être piloté à distance pour relever la consommation ou même diminuer la puissance en cas d’impayés. Mais ENEDIS, le gestionnaire de réseau effectue ces manipulations au cas par cas, sur chaque point de livraison (PDL).
Un risque de mesure inégalitaire
Pour que le compteur Linky puisse servir à équilibrer le réseau en permettant des diminutions de puissance ou même des coupures, il faudrait pouvoir intervenir sur un très grand nombre de compteurs en même temps, pour que cela soit efficace. Et on ne sait pas si cela est techniquement possible. La procédure n’est probablement pas prévue dans le système de pilotage des compteurs.
Il faudrait également prendre certains arbitrages : les coupures ou baisses de puissance interviendraient-elles par zone géographique, selon la puissance souscrite par l’utilisateur ou d’autres critères ? Le bridage de puissance serait-il appliqué à la totalité des clients ou seulement les plus consommateurs ?
Quid des 10 % de clients qui ne sont toujours pas équipés d’un compteur Linky (par choix ou non) et qui ne subiraient aucune limitation ? Cette intervention poserait un problème d’égalité de traitement entre les usagers si seuls certains d’entre eux étaient touchés.
En outre, les consommateurs ont signé un contrat auprès de leur fournisseur prévoyant une puissance déterminée. Ils payent d’ailleurs le prix de l’abonnement correspondant à cette puissance. La diminuer remettrait en cause ces contrats et une intervention législative semble indispensable.
Même s’il peut être rendu techniquement possible d’agir sur des millions de compteurs Linky pour équilibrer le réseau, sa réalisation poserait son lot de problèmes et protestations ... Lire la suite de l'actu sur revolution-energetique.com